La population qui fait l'objet des processus territoriaux décrits ci-après est celle qui a décidé de rester pour défendre ses rêves, ou tout au moins de les emporter dans la tombe: voilà ce qu'il faut comprendre lorsqu'on décrit en termes très génériques une population de 350 000 habitants, le Putumayo, ou de l'ordre du million, comme l'Amazonie colombienne, et que l'on s'empresse de qualifier, sans états d'âme ni nuances, comme un composant critique de la guerre, qui vit actuellement immergé dans la réalité de ces diasporas, de ces déplacements. Il n'est donc pas surprenant que l'un des premiers postes dans le chapitre d'investissement social du Plan Colombia soit consacré à ce segment de population et à la "nécessité" de la relocaliser.

Les processus historiques qu'ont dû traverser ces populations indigènes, dans un constant effort d'adaptation aux situations nouvelles imposées par l'immigration dans leurs territoires, furent complexes et traumatisants. L'effet le plus visible en est sans conteste une dynamique interculturelle qui se reflète dans une "nouvelle culture amazonienne", qui rend désuets les schémas figés d'indigénisme, de paysannisation, de métissage ou de colonisation. Il faut comprendre le nouvel habitant amazonien dans le contexte de ses interactions permanentes avec ses semblables, le milieu, le présent de la guerre, les voisins et les nouvelles populations récemment installées sur ses territoires, sans pour autant ignorer ses particularités, son origine, ses rêves et tout ce qui fait son identité. Ce n'est que dans ce cadre que l'on pourra construire la solution que réclame le présent, et où le thème de l'identité culturelle relève plus du fond, de la pensée, que de la forme.

Dans ce document, nous décrivons certains des processus touchant à l'aménagement du territoire dans le piémont amazonien, fruits de la réflexion commune des communauté qui habitent ce territoire, et de quelques entités ou organisations qui ont trouvé intéressant d'entamer un dialogue sur le futur de l'Amazonie.